Sangha-Mane
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 La vacuité 2

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Djé
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Djé


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Date d'inscription : 30/08/2008

La vacuité 2 Empty
MessageSujet: La vacuité 2   La vacuité 2 Icon_minitimeDim 31 Aoû - 20:37

La Vacuité



Logiquement rien ne peut être à la fois vide et non vide, si ce n'est
dans le sens où quelque chose peut avoir deux aspects différents. Avec
le concept de vacuité, le bouddhisme nous apprend à concevoir et
surtout à expérimenter la non-dualité qui est l’essence de la vacuité.


Par John Blofeld



La vacuité (shunyata, en sanskrit) est un grand mystère. C'est un
concept qui est au cœur même de tout l'enseignement du Bouddhisme
Mahâyâna. On a écrit sur ce sujet d'innombrables traités et les
allusions qui y sont faites dans les écritures sacrées rempliraient des
volumes. Pourtant, comme tout ce qui est objet d'expérience mystique,
la vacuité ne peut être ni décrite ni définie. En vérité, à peu près
rien n'en peut être dit qui vaille. Peu de savants occidentaux
paraissent en avoir saisi le sens, et même dans les pays bouddhistes, à
l'exception de rares mystiques accomplis qui, dans leurs médi-tations
les plus profondes, se sont trouvés face à face avec la vacuité, il y a
relativement peu de gens qui, grâce à certaines intuitions
préliminaires acquises au cours de la méditation, associées à une vaste
connaissance des sûtras, peuvent s'être formé une idée approximative de
ce qu'est la vacuité.
Quant à moi, qui suis très loin d'être un mystique accompli, écrire ne
serait-ce que quelques lignes à son sujet est présomption pure. La
raison qui m'incite à prendre ce risque est double. Tout d'abord, la
connaissance que j'ai acquise auprès de mes maîtres chinois et
tibétains m'autorise peut-être, tant soit peu, à proposer quelques
directives, qui permettent de se faire une idée imparfaite de ce que
les sûtras veulent dire quand ils parlent de la vacuité.


En second lieu, je crois que l'accusation de pessimisme, totalement
infondée, que certains critiques occidentaux lancent contre le
Bouddhisme tient, en une large mesure, au fait qu'ils confondent la
vacuité et le vide pur et simple - au sens négatif de néant -ils
aboutissent ainsi à la conclusion (blasphème pour les Bouddhistes) que
le nirvana est synonyme d'extinction. Pourtant, je ne suis pas du tout
certain d'avoir correctement compris l'enseignement reçu de mes maîtres
et des sûtras et, dans mes méditations, je n'ai à aucun moment,
approché moi-même de l'expérience de la vacuité, de sorte que ce que
j'en dis doit être reçu avec la circonspection que peut éprouver un
aveugle qui accepte de se laisser guider par un pauvre myope.
L'idée- clé est donnée dans le petit Sutra du Coeur qui est récité
chaque jour en Chinois, en tibétain ou en Sanskrit) par des millions de
Bouddhistes mahayanistes. Ce sutra affirme nettement que “ la forme est
vacuité et la vacuité forme : que la forme ne diffère pas de la vacuité
ni la vacuité de la forme. ” Bien que son sens véritable puisse ne pas
paraître d'une clarté lumineuse, du moins démontre-t-il que la vacuité
est quelque chose de très différent du simple néant. L'explication
qu'on en donne généralement, c'est qu'il ne peut y avoir de séparation
valable entre l'absolu et le relatif, entre la réalité et les
apparences, entre la source et l'univers (et donc entre le “ créateur ”
et le “ créé ”). Rien n'est réel, au sens où rien n'a une existence
indépendante qui lui appartienne en propre, ou n'est rien de plus qu'un
phénomène temporaire (lui-même combinaison de millions de phénomènes
encore plus fugitifs) : pourtant tout est réel, au sens où c'est une
manifestation de l'être sans attribut et donc insaisissable.


Proposons une comparaison grossière : les vagues isolées de la mer
n'ont aucune permanence ni aucune existence, elles changent d'instant
en instant et se confondent pour disparaître aussitôt, - pourtant qui
peut dire qu'aucune de leurs parties n'existe plus tant que la mer
elle-même demeure ? Cette comparaison n'est pas sans faiblesse, car si
une vague, quel que soit le moment où on la considère, n'est rien
d'autre que la mer, ce n'est pas la mer en son entier, mais seulement
une partie : tandis qu'en parlant de vacuité, nous n'avons affaire à
rien qui soit soumis aux lois spatiales, de sorte que chaque “
particule ” est en fait le tout. C'est pourquoi les Chinois préfèrent
la comparaison avec le soleil dont les images se réfléchissent dans
l'eau de multiples réceptacles : “ chacun de ces réceptacles contient
un soleil et chaque soleil est tout à la fois complet en lui-même et
pourtant identique au soleil du ciel... de plus... le soleil du ciel
n'en est nullement diminué pour autant. ” (Huai-Hai, 8e siècle de l'ère
chrétienne.)
Ailleurs le même écrivain parle de l'Illumination comme de “ la
réalisation de l'identité de la forme et de la vacuité ”. Cependant il
indique plus loin deux espèces de vacuité - celle qui est associée à la
non-vacuité et “ l'ultime vacuité ” qui est au-delà de la dualité de la
vacuité et de la non-vacuité. Or il va sans dire que la vacuité dont le
mystique fait l'expérience est la première des deux, parce qu'il y
parvient à partir d'un état de conscience dit “ normal ”, dans lequel
la non-vacuité est constamment apparente, et il s'attend à retrouver
cet état après son expérience mystique. Comment peut-il éviter de
comparer son état de vacuité avec l'état de non-vacuité qui le précède
et le suit ? Néanmoins si son expérience a été profonde, il émerge de
sa méditation avec la conviction absolue que vacuité et non-vacuité ne
constituent pas une alternance, car elles sont non seulement
coexistantes mais absolument identiques.


C'est là que la logique nous trahit. Logiquement rien ne peut être à la
fois vide et non-vide, si ce n'est dans le sens où quelque chose peut
avoir deux aspects différents. C'est pourquoi, tout particulièrement,
l'Occidental qui a été entraîné à penser en termes de catégories
logiques tombe, jusqu'à un certain point, dans le dualisme. Il peut
admettre que, dans l'abstrait, le vide et le non-vide soient réellement
une seule et même chose, mais les limitations que lui impose sa
formation logique le contraignent à considérer les deux aspects
coexistants de la réalité - vacuité et non-vacuité - de toute façon
comme temporairement séparés en une certaine mesure. L'initié oriental
ordinaire éprouve le même genre de difficulté parce que l'expérience de
chacun dans l'état mystique (de vacuité) diffère de son expérience dans
l'état dit “ normal ” (de non-vacuité) : pourtant comme son esprit
s'est trouvé moins modelé par la logique occidentale, il est, dès
l'abord, probablement plus apte à admettre intellectuellement que le
vide et le non-vide peuvent être une seule et même chose en même temps
: ainsi dans sa recherche d'une expérience mystique réellement vécue de
leur unité, il a moins d'obstacles à surmonter.


On peut objecter que Huaï-Haï, l'écrivain que je viens de citer a, lui
aussi, succombé à cette erreur du dualisme, puisqu'il indique deux
sortes de vide : mais je suis certain que, moins que tout autre, il ne
saurait être coupable (ou victime) d'une aussi grossière erreur. De
toute évidence la distinction qu'il établit est subjective : la vacuité
est associée à la non-vacuité dans l'esprit de ceux qui vont et
viennent entre un état de conscience qui perçoit tout comme non-vacuité
et celui qui perçoit tout comme vacuité : mais cette même vacuité -
telle qu'elle est réellement, et indépendamment de la façon dont elle
est expérimentée et de la personne, est pour toujours au-delà des
distinctions du vide et du non-vide.


Cette doctrine de la vacuité, même si elle n'est que vaguement comprise
- pourvu qu'elle ne soit pas mal interprétée ! - suffit à nous
détromper de l'idée que le Bouddhisme est pessimiste. Comment la mort
ou l'extinction peut-elle être une cause de chagrin si absolument rien
ne meurt ou ne s'anéantit ? Aussi longtemps que nous persistons à
croire que nous sommes vraiment des entités individuelles, qui
subissent la naissance, la croissance, le déclin et la mort, nous avons
de suffisantes raisons de verser des larmes. Mais quand (par l'usage de
la méditation véritable) il apparaît soudain clairement que “ je ”
n'est pas “ je ”, que la conscience individuelle n'est pas du tout
individuelle mais s'identifie à cette conscience lumineuse, dont
l'existence est indépendante, sans objet et qui est l'être de l'univers
entier - sans naissance, sans mort, incréé et indestructible - alors il
peut se permettre de rire à la pensée de la mort, la sienne propre ou
celle de n'importe qui. Admettons qu'il y ait des gens qui s'accrochent
à cette vie forcément insatisfaisante et à la croyance dans la réalité
de leur moi, de façon assez tenace pour se dire que la pensée de se
perdre dans l'infini est beaucoup moins attirante que la croyance en
une existence individuelle sous une forme ou sous une autre, qui soit
éternelle. Si nous nous figurons que nous sommes présentement des
individus, la peur de perdre notre individualité peut bien nous causer
une certaine anxiété : mais à un parfait mystique qui sait, sans aucun
doute possible, d'après une expérience vécue, qu'aucune individualité
n'a jamais existé, la pensée de perdre cette individualité est
absolument dénuée de sens. Tout ce que nous avons à perdre - en cette
vie ou en une vie future - c'est l'illusion vaine d'être des individus.
C'est cette illusion, soit dit en passant, qui est responsable de
toutes les frustrations de la vie et de la plupart de ses souffrances.
Quel bonheur de la perdre !


Si je devais montrer cet article à un de mes maîtres tibétains ou
chinois, il me dirait probablement “Déchire-le ! A quoi bon perdre ton
temps et celui des autres en discussion philosophique, en spéculation
dépourvue de sens, sur ce que les Sutras appellent la vacuité ? Dix
gros volumes sur ce sujet ne vous mèneraient ni toi ni tes lecteurs,
plus près d'une compréhension véritable. La vacuité est là dans ton
esprit et partout ailleurs. Ce qu'il faut, c'est en faire l'expérience.
Cesse donc d'écrire ou même de lire et cherche à en faire l'expérience
directe tout de suite. ”


Je présume que ce conseil serait accompagné d'un sourire : car, en
fait, même les maîtres les plus éclairés sont amenés, en une certaine
mesure, à écrire et à parler - tout juste assez pour faire prendre
conscience à leurs disciples qu'il y a un trésor à chercher, sans quoi
ils risquent de gaspiller les heures et les années sans tenter cette
quête.


Pourtant je n'ai jamais entendu aucun de mes maîtres prétendre définir
la vacuité. Ils sont beaucoup plus soucieux de fournir des méthodes
grâce auxquelles tout disciple peut, s'il a suffisamment de zèle, la
découvrir lui-même, en franchissant les bornes étroites de la logique,
ses enchaînements de concepts et son dualisme, pour pénétrer dans le
domaine illimité de l'expérience pure.


Les méthodes tibétaines pour réaliser une telle expérience sont
multiformes, car il est reconnu que les obstacles varient selon
l'apti-tude naturelle, l'intelligence, l'entraînement de chaque
disciple. Pourtant elles sont toutes très voisines dans leur essence.
Pour préparer l'esprit au bond en avant, elles comportent toutes une
très fréquente méditation du mantra qui s'interprète ainsi : “ La
vacuité est l'essence de tous les dharmas (tous objets, concepts etc.)
et moi-même je suis aussi de l'essence de la vacuité. ” La puissance de
suggestion de la répétition fréquente est très forte - assez forte pour
aider à la destruction des obstacles édifiés au cours d'une vie par des
gens qui jugent le monde phénoménal selon l'apparence. La plupart des
méthodes comportent aussi un genre d'entraînement à la méditation basé
sur la représentation visuelle. Une série de symboles bien choisis est
visualisée aussi souvent et aussi nettement que possible.
Progressivement ces symboles se fondent l'un dans l'autre et ensuite
dans l'être méditant, qui se confond ainsi avec le symbole. Le
processus de fusion et de réduction se poursuit jusqu'à ce qu'il ne
subsiste plus qu'un point minuscule et celui-ci disparaît à son tour
dans la vacuité. Naturellement le processus réussit rarement avant
qu'on n'ait atteint une maîtrise considérable de l'esprit. Cependant de
petits succès au début permettent de saisir ce qui reste encore à
réaliser.


La valeur d'une certaine perception directe ou indirecte de la vacuité
est évidente. Si le disciple est, par expérience, parfaitement
convaincu de la relativité et de l'impermanence de toute chose (y
compris, naturellement, de son propre moi), il sera libéré de son
attachement à des formes et à des idées vides, ce qui est la condition
élémentaire et préalable à tout réel progrès spirituel. Il sera libre
en ce sens que rien ne pourra le dominer ou le retenir. Son point de
vue sur toutes les choses de la vie en sera radicalement modifié. Il ne
sera plus pris au piège de la cupidité, du désir, de l'égoïsme, du
chagrin, de la peur : affranchi de toutes les entraves, il pourra
avancer librement sur le sentier qui conduit à la pleine Illumination.
Quand on parle du face à face avec la Vacuité, on parle d'une
expérience infiniment sacrée, car la vacuité n'est rien d'autre que la
matrice de l'existence, la réalité ultime dans laquelle le passé et
l'avenir, le proche et le lointain, l'Un et le Multiple sont
transcendés et où plus rien n'obscurcit l'éclat rayonnant du Vrai. Au
stade actuel, nous voyons l'Un sous l'aspect du Multiple : à un stade
plus avancé (la vacuité moindre), nous voyons le Multiple sous l'aspect
de l'Un : quand le but est atteint, ils se révèlent tous les deux dans
leur forme éternelle qui transcende toute distinction - forme
miraculeuse et sainte au-delà des mots et des pensées.


John BLOFELD. (Traduit de l'anglais par Odette Germain).

1964



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