La méditation du Calme mental – "Thubten KALSANG".
(Extrait du : le Tibet journal – éditions Dharma – 30140 Anduze.)
Avant de vouloir s'exercer à la pratique du Calme mental "shiné",
l'unification de l'esprit sur un objet, il convient de connaître les
cinq empêchements et les huit remèdes.
-La première entrave est la paresse ; quatre remèdes s'y opposent :
1) La confiance dans les avantages de la réalisation de la concentration en un seul point.
2) L'intention "motivation" et la prise en compte de la nécessité de cet exercice.
3) La persévérance et l'effort.
4) L'attente de l'extase physique et mentale qui accompagne
l'unification de l'esprit. Une conscience paresseuse n'éprouve aucun
intérêt pour la méditation.
-La seconde entrave est l'oubli. La mémoire est le remède approprié
pour un état d'esprit oublieux des instructions concernant la
méditation.
-Le troisième obstacle est constitué par l'opacité et l'agitation
; son antidote est la vigilance. Soyez constamment sur vos gardes pour
que l'esprit, dès la manifestation de cet obstacle, en prenne
immédiatement conscience.
-Le quatrième empêchement apparaît au cours de la méditation,
lorsqu'une distraction survient sans que l'esprit agisse à son
encontre. Dans ce cas, le remède est une action contrecarrante
immédiate.
-La cinquième gène consiste en l'application inadéquate des
remèdes. L'équanimité en est le contre poison. Il est recommandé de
n'appliquer les remèdes qu'en cas de nécessité.
Après l'étude des cinq empêchements et des huit remèdes, on se
préparera pour l'exercice de cette discipline. La réalisation du calme
peut être obtenue en moins d'un an. À cet effet, on tâchera d'éviter
continuellement toute action malhabile et l'on observera une stricte
moralité.
Avant de se retirer, le disciple aura acquis auprès d'un maître,
une bonne connaissance des instructions. Le lieu idéal pour une
retraite méditative possède sept qualités :
1) L'isolement et le calme.
2) Bien qu'éloigné il ne devra pas se trouver trop distant, d'un
endroit propice pour se procurer la nourriture et l'indispensable.
3) Pour la relation aux amis et conseillers spirituels, son accès sera possible.
4) L'environnement et la situation seront sans risque.
5) L'eau trouvée à proximité doit être potable.
6) Le point de vue doit être agréable.
7) Ce lieu, doit offrir la possibilité de quelques promenades, selon le besoin.
La réalisation de la concentration en un seul point sera une aide
pour toutes vos entreprises. Par la suite la méditation sur la vacuité,
deviendra efficace, claire, et vous serez en mesure de vous opposer aux
divagations. La pacification des perceptions extérieures et la fixation
de l'esprit sur l'objet de concentration définissent l'unification.
L'objet est choisi en fonction des tendances personnelles : "image,
statue, etc.". Un objet extérieur convient mieux que son propre esprit,
car ce dernier choix présente plus de difficultés techniques. Une fois
l'objet défini, placez votre esprit sur lui jusqu'à l'unification. Il
est déconseillé de changer de cible au cours de la pratique.
Neuf étapes conduisent à la concentration unifiée. L'illustration
type de ce cheminement montre un moine s'y exerçant. [Voir dessin].
Il tient un lasso et un crochet symbolisant respectivement la mémoire
et la vigilance. Six courbes le long de la voie évoquent les six forces
à appliquer pour progresser. L'éléphant exprime le mental indiscipliné
s'égarant çà et là. Celui n'ayant jamais tourné son esprit vers
l'intérieur est incapable de se rendre compte de la façon habituelle
dont il s'égare… La noirceur de l'éléphant représente l'opacité
mentale. En cas d'affaissement mental, l'esprit est ténébreux. Le singe
montre la dispersion et son pelage sombre l'agitation. Tout au long du
sentier, les flammes indiquent l'extrême nécessité de mettre en œuvre
les pouvoirs cérébraux s'opposant aux distractions. Les cymbales, les
fruits, la conque, le miroir et l'écharpe, etc., se rapportent aux
causes de la dispersion : les objets des cinq sens.
Le premier stade obtenu est appelé, fixation de l'attention. On
commence par regarder et examiner l'objet extérieur, en essayant de se
remémorer ses détails, puis on détourne les yeux et on tente de le
reconstituer intérieurement. Lors de cette première étape, de
nombreuses pensées se manifestent. Il faut appliquer les forces de la
mémoire et de la vigilance pour ramener l'esprit à l'objet de
concentration.
Le second stade, fixation de l'esprit est atteint si, il demeure
sur l'objet environ cinq minutes. On devient capable de visualiser
clairement son support, toutefois, la dispersion reste fréquente. Dans
ce cas, interrompez votre séance, pour la reprendre un peu plus tard,
tout comme une rivière dont le courant ralenti par un passage étroit,
retrouve plus loin son cours normal. La première courbe sur le
graphique connote la force que représente l'écoute des enseignements.
Avant d'être à même de méditer, recevez maintes instructions. Au
premier et second stade, l'opacité et l'agitation sont les entraves
principales. Il est conseillé d'y faire très attention.
Le troisième stade, s'appelle placement de l'attention. Lorsque
l'esprit a tendance à s'éloigner, ramenez le à l'objet de méditation.
Une vigilance extrême est demandée afin d'empêcher la distraction et de
prendre conscience de l'opacité et de l'agitation qui ont chacun un
aspect grossier et un aspect subtil. L'image du lapin juché sur le dos
de l'éléphant montre, qu'à ce moment vous possédez la capacité de vous
rendre compte et de reconnaître, ces deux ennemis principaux. Un objet
visualisé sans finesse et sans clarté, démontre l'opacité grossière.
L'aspect subtil correspond à une vision détaillée, quoique toujours
dotée d'une clarté imparfaite, autrement dit : la clarté de l'objet
reste faible. Lorsque l'esprit est attiré par un objet extérieur on en
présence de l'agitation grossière. Sa forme subtile se manifeste
lorsque l'esprit, sans s'écarter de son objet, n'y demeure pas
totalement fixé. Bien que pour l'essentiel il y soit solidement
attaché, une petite partie de la conscience vagabonde tout comme un
fleuve courant sous la glace. Au cours de ce troisième stade, les
difficultés principales proviennent de formes grossières d'opacité
telle que la somnolence.
Le quatrième stade, est l'attention très soutenue, en raison d'un genre
de mémoire grandissante, l'attention ne faiblit pas et l'on est capable
de fixer l'objet pour un certain temps. Le pouvoir de la vigilance issu
de la fixation de l'attention est accompli. Une méditation par trop
prolongée pourrait assombrir l'esprit, soyez également conscient de
cette forme d'opacité.
Le cinquième stade, est la pacification de l'esprit. Cela signifie la
suspension de l'opacité et de l'agitation grossières. À ce point, la
principale difficulté reste les formes subtiles d'opacité, c'est-à-dire
d'obscurcissement intérieur. C'est le moment où, sur le schéma, le
singe est laissé en arrière, ceci indiquant que l'opacité et
l'agitation cessent d'être une gène importante. Le moine frappe de son
crochet la tête de l'éléphant, il montre par ce geste le grand besoin
de vigilance. Les formes subtiles d'opacité, (obscurcissement et
affaissement), ne sont pas aussi faciles à reconnaître à ce cinquième
degré, que lors des étapes précédentes pour leurs aspects grossiers. La
tendance à s'arrêter à ce niveau, est un danger qu'il ne faut pas
négliger. On pourrait en effet le prendre pour l'étape finale. La
vigilance est toujours utile pour se rendre compte de l'opacité.
Lorsque, dans la pratique ses modalités subtiles se présentent,
levez-vous, marchez et aspergez-vous un peu le visage, puis, méditez
sur"le précieux corps humain"
Avec l'obtention du sixième stade : l'esprit s'apaisant, vous aurez
à la fois surmonté les formes grossières et subtiles d'opacité et
d'agitation. Restez néanmoins conscients de leurs aspects très subtils.
À ce point la force de la vigilance est développée. L'opacité et
l'agitation n'ont plus le pouvoir de vous perturber énormément. Vous
êtes désormais à même d'éliminer aisément les rares obstacles qui se
présentent. Vous allez progresser naturellement jusqu'à la réalisation
du Calme.
Au septième stade : pacification subtile de l'esprit, la force de la
persévérance vous donne la capacité de vous débarrasser facilement de
tous les empêchements. C'est pourquoi, arrivé là, seule la queue de
l'éléphant reste noire.
Au huitième stade : profonde concentration, l'esprit une fois placé sur
l'objet y reste fixé aussi longtemps que désiré. Les interruptions
causées par l'opacité et l'agitation cessent. La concentration se
déroule sans difficulté.
Au neuvième stade, connu sous le nom de concentration sans effort, vous
êtes pareil à celui ayant mémorisé un mantra, qui n'a plus besoin d'une
concentration intense pour se fixer sur son objet. Le contrôle mental
est acquis avec un effort minimum. C'est à ce stade qu'apparaissent les
sensations de joie et de félicité accompagnées d'une sensation de
chaleur à la tête. Les extases physiques et mentales atteignent leurs
apogées puis, tandis qu'elles déclinent, font place à une grande
légèreté du corps et de l'esprit. Il est à noter qu'un contrôle parfait
de l'esprit, de manière à n'accomplir que des actions vertueuses, est
un préalable pour l'apparition de l'extase mentale. Après la
manifestation de cette double félicité, il convient de poursuivre la
pratique de l'unification en un seul point. Tant que vous n'aurez pas
atteint le Calme, ne changez pas d'objet de méditation, mais après
cette réalisation, c'est la vacuité qui doit être choisie.
Le singe cueille les fruits de l'arbre, cela signifie qu'une fois
la concentration obtenue, il convient de continuer de méditer sur
divers sujets.
Le moine voyage sur le dos de l'éléphant et brandit une épée.
Toutes les souillures sont tranchées. C'est par l'union de la Sagesse
et du Calme mental que sont anéanties les perturbations.
Six forces et quatre activités mentales contribuent à l'ascension à
travers les neuf stades. La force de l'écoute permet d'atteindre le
premier et la force de la pensée le second. Pour ces deux niveaux,
l'activité mentale appelée "pousser l'attention" est requise, car
l'esprit vagabondant encore, une application intense s'impose. Le
troisième et quatrième stade sont atteint grâce à la force de la
mémoire. Le quatrième stade correspond à une mémoire parfaite.
Du troisième au septième niveaux, il s'agit d'états correspondants
à l'attention interrompue : l'opacité et l'agitation s'interposent
souvent dans la méditation et la seconde activité mentale : replacement
de l'attention, est mise en œuvre pour ramener l'esprit à l'objet. Le
pouvoir de vigilance, permet l'obtention des cinquièmes et sixièmes
stades. À partir de ce dernier, seules des formes très subtiles
d'opacité et d'agitation perdurent, vous en triompherez au cours du
septième. Celui-ci et le huitième sont atteints grâce à la force de la
persévérance. Lors de ce dernier, il suffit de placer une fois
l'attention, sur l'objet pour assurer de longues périodes de méditation
exemptes de toute distraction. C'est l'étape de concentration
ininterrompue. Le neuvième stade est atteint par la force de
l'accoutumance, accompagnée de l'activité maintenant l'attention sur
l'objet sans effort.
Dans la pratique du Calme, concentration unifiée sur l'objet de son
choix, même les pensées vertueuses deviennent des empêchements. Une
fois l'entraînement commencé, ne l'interrompez pas, ne serait-ce qu'une
journée. Concentrez-vous tout d'abord sur l'apparence générale de
l'objet, puis, tranquillement, observez le plus en détail. Ce n'est
qu'après avoir testé la capacité de l'esprit à s'y maintenir, que vous
vous concentrerez sur la clarté des détails. S'en préoccuper trop
hâtivement ferai courir le risque de s'écarter du propos initial. Le
méditant doit toujours rester conscient de son état et emprunter un
moyen terme quant à ces efforts. Trop forcer l'esprit n'est qu'une
cause d'agitation, à l'inverse une attention trop lâche amène
l'opacité. Une attention soutenue est le remède à l'opacité et à la
somnolence, dans le cas où elle reste insuffisante pour les chasser,
méditez sur "le précieux corps humain". Si malgré tout, les mauvaises
tendances ne diminuent pas, visualisez alors à votre cœur une boule de
lumière blanche, puis dites: "PHAT", en imaginant que des rayons
lumineux en provenance du centre cœur, sortent par le sommet de votre
tête. Répétez la procédure trois fois. Pendant ce processus l'esprit
demeurera fixé sur l'objet de concentration. Si vraiment tous ces
exercices restent sans effet, stoppez et allez faire un tour !
L'affaissement mental, est une forme d'opacité qui peut être
stoppée, en pensant aux aspects les plus élevés des enseignements,
leurs fruits. D'un autre côté, l'agitation est toujours associée au
désir, à la vue de la beauté, l'esprit est aisément perturbé. Dans ce
genre de méditation, le principal obstacle est l'effervescence mentale.
Le Calme est développé uniquement par l'esprit et non par les organes
des sens, c'est pourquoi il est bon de commencer la séance, en fixant
l'objet avec les yeux pour ensuite en détourner le regard, et
poursuivre en s'y concentrant par l'esprit. La concentration en un seul
point procure un grand contrôle de l'esprit. Une fois la complète
pacification atteinte, le courant de pensée demeure unifié.